dimanche 9 février 2014

Mon père , ce héros .....

1 an que tu n'es plus là , que tu m'as lâché la main , que l'absence me ronge et que je me questionne sur le sens de la vie.
1 an que ma vie a pris un autre visage , un visage plus sérieux , plus grave , moins léger ....
C'était il y a un an .... le coup de fil de mon frère en larmes à 6h du matin qui m'arrache d'un sommeil que je ne retrouverais plus jamais après .... les sanglots de mon petit frère qui l'a vu partir , dans ses bras , qui s'en veut encore aujourd'hui de ne pas avoir réussi à prodiguer les 1ers soins dans l'attente des secours .... mes cris , mes hurlements , cette douleur qui me déchire dès la 1ère seconde ... cette instant que j'ai redouté toute ma vie ... tout qui se bouscule dans ma tête , pourquoi maintenant , pourquoi lui , pourquoi moi , j'ai tant besoin de toi , pas maintenant , je t'en supplie , tu vas te relever , tu es fort comme un lion , je n'y crois pas , je ne comprends pas ... la route fraîchement enneigée que j'emprunte au volant de ma voiture qui hurlera tout le chemin que je n'ai pas attaché ma ceinture ... et moi accrochée à ce maudit volant qui crie papa .....
Je me souviendrai toujours du regard de ce pompier qui remontait dans son camion , qui m'a vu arriver , qui a compris qui j'étais , ce regard si gêné ... les gyrophares du camion , sans un bruit dans la rue encore plongée dans la nuit , mes pas sourds sur la neige , j'avais envie d'hurler au voisinage de se réveiller , de sortir , mon père est mort , levez vous tous ....
Je me souviendrai jusqu'à mon dernier souffle de cette silhouette qui s'approche , que je ne reconnais pas tant je suis sonnée , cette silhouette qui vient me serrer fort dans ses bras d'homme , et oui mon petit frère , tu étais si fragile quand tu étais enfant , tu es aujourd'hui un homme et c'est toi qui me maintient pour que je ne m'écroule pas sur le trottoir , j'entends tes larmes , c'est notre monde qui s'écroule , la vie ne sera plus la même ...
La maison déjà toute illuminée , les portes grandes ouvertes malgré ce froid piquant , les meubles qui ont virevolté dans la bataille , à l'arrivée des pompiers et du SAMU , des traces de sang au sol, la chemise de mon père arrachée , dans un coin ...
Ma mère qui vient nous serrer , ses râlements dans la voix , elle compte les années de mariage .... Nous ne sommes plus que trois , il est dans la pièce à côté , sans un souffle , mais nous sommes déjà seuls , nous ne sommes plus que trois .... Nous qui avons toujours été 4 , malgré les épreuves , nous étions 4 , tellement soudés les uns aux autres , il nous a lâché la main , je n'y crois pas , je suis entre réalité et folie .... 

Mon Père , il était beau , il était fort , il était le pilier de ma vie , il était ma force , mon ambition , il me rassurait , il me conseillait , il m'apaisait ... Il était tout simplement l'Homme de ma Vie . Avec mes yeux de petite fille , je le respectais , il me rendait fière.
Et puis un matin d'hiver , un matin enneigé , il nous a lâché la main , il s'est effondré pour ne jamais se relever. Ce matin là ma vie a basculé et j'ai compris que rien ne serait plus jamais comme avant.
Il est parti il y a tout juste un an aujourd'hui. L'année fut chaotique. Mon âme m'a promenée dans les bas-fonds les plus terrifiants. Mon corps a souffert. Mon travail de deuil reste l'épreuve de ma vie. J'ai eu peur . Cette peur au ventre qui vous empêche d'avancer. Persuadée que je ne serais pas à la hauteur, je me suis laissée tomber.
Le manque et l'absence sont les plus douloureux. Suivent les nuits sans sommeil, les angoisses, le manque d'envie , la perte de confiance , l'envie de se replier sur soi et de ne plus sortir , les questions sur la vie , où trouver la motivation de continuer ....
Et puis il faut prendre ses responsabilités. A contre coeur je me suis occupée de tout , absolument tout, des papiers dont je n'avais jamais entendu parler , je me suis plongée dans les procédures , la joie de l'administration , j'ai pris sa place , tout naturellement ...
J'ai plongé , souvent , sans avoir l'envie ni la force de remonter. J'ai souffert du plus profond de mon être. Je remontais toujours , pas bien haut... 

Il en aura fallu des heures , des jours , des semaines ... des photos , des chansons , des poêmes , des souvenirs , des mots , des lettres , des visites au cimetière , des monologues devant un nom gravé dans le marbre ... Au carrefour de ma vie , j'ai enfin décidé d'aller demander de l'aide. 

Le travail de deuil est long , terriblement long , je pense même que c'est le travail de toute une vie. Il est personnel et unique. Il nous renvoie à nos blessures jamais pansées , il réouvre des douleurs cachées , il réveille l'angoisse de notre propre mort , il est l'occasion de faire le point sur les buts et les vraies priorités de nos vies. Pour ma part il m'a recentrée sur l'essentiel et aidée à faire un ménage autour de moi.

Ma meilleure amie qui , à cette époque , vivait aux Etats Unis et était donc bien trop loin de moi pour me serrer dans ses bras, m'a fait parvenir un livre qui m'a beaucoup aidé à comprendre que tout ce que je vivais était normal. Certaines explications m'ont même déculpabilisée. De plus il m'a également expliqué ce que j'allais vivre dans les mois à venir.
Très pédagogique , il décrit très simplement le processus du deuil :

livre
livre2




Et puis il y a les enfants. Il faut gérer leurs questions , leur peine à aux aussi. J'ai toujours beaucoup discuté avec mes enfants , sans tabou. Et un jour , j'ai crée des petites planches de dessins pour illustrer ce genre de moments. Elles sont l'occasion d'échanger avec les enfants sur les évènements de la vie et de mettre le doigt sur des choses qui étaient jusque là restées en sous marin.
Voici celle que j'ai dessiné qui concernait la disparition de leur papie :


img230
Aujourd'hui , un an plus tard , je me dis que j'ai parcouru une véritable ascension de l'Everest. J'aurais pu être plus forte , j'aurais pu mieux me relever quand il l'a fallu... mais je crois que finalement j'ai fait ce que j'ai pu ... On n'est pas égal face au deuil. J'ai réagi en fonction de mon expérience , en fonction de mon passé , des armes que l'on m'avait ou non transmises , de l'amour que j'ai reçu ... Je n'ai rien réussi , je n'ai pas échoué , j'ai simplement tenté de rester vivante .....


« Je me suis laissée plonger dans le chagrin, j'ai pas lutté... Et puis, un jour, je me suis dit : tu peux encore sourire, tu peux encore marcher, tu es en bonne santé, tu as toutes tes facultés. Il y a plein de choses à faire, plein de gens à rencontrer, et la joie est revenue. La joie de vivre. C'était inexplicable. J'ai eu à nouveau envie de vivre .»     K.Pancol

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire

Votre commentaire est le bienvenu :)